Photographe professionnel : un métier en danger ?

Voici un long article, si la condition des photographes professionnels ne vous intéresse pas, passez votre chemin!

Jeune femme moulant des parties de son corps

Photographies réalisées durant des performances de Trouble à Bruxelles.

Les photographes professionnels (entendez ceux bien déclarés qui paient leurs charges et travaillent beaucoup pour sortir leur salaire) sont devenus des pigeons, des vaches à lait. Leur avenir est compromis si des changements n’interviennent pas, vous allez comprendre pourquoi:

Plusieurs dangers pèsent sur cette profession, je vais vous en lister quelques uns (et ne pas me faire beaucoup d’amis au passage):

Pour vos fiches de résumé :

— Associations bidons
— Photographes non déclarés
— Siret re-employé (votre plombier photographe)
— Les clients qui font les tarifs
— La fin des droits d’auteur
— Le paiement par compensation (vous aimez les croquettes?)
— Les microstock (moins cher que moins cher!)
— Le filmage détourné
— Les sites de devis
— Les positions annuaires au plus offrants
— Les casseurs de prix tueurs de photographes comme Groupon
— Les galeries fast-art
— Les photographes contraints à fausses déclarations.

Si l’homme est un loup pour l’homme : le photographe est un loup pour le photographe!
En effet, une part de photographe a décidé de ne pas jouer le jeux de cette profession, de tenter toutes les malices afin de gagner sa vie avec la photographie, employant même des moyens non légaux!
Parmi ces « gros malins » : un certain nombre d’associations se sont créées depuis quelques temps avec des statuts non adaptés à la réalisation de travail commercial, profitent d’avantages fiscaux notables en dépit des lois, exercent une concurrence directe et déloyale avec les photographes professionnels. A ceux là, je dirai que des photographes professionnels se rassemblent pour lancer des actions en justice, cela ne durera pas aussi longtemps que les impôts qui vous rendront visite bientôt, d’ailleurs !

Ensuite, bon nombre de personnes proposent du travail au noir, des prestations non déclarées, ils sont devenus légions sur facebook, book.fr et autres supports. Les consommateurs sont heureux de profiter de cette « aubaine » : juste une petite question : êtes-vous heureux de payer plus d’impôts pour eux? êtes vous certains que vous n’auriez pas une plus grande sécurité, de meilleurs résultats avec des vrais professionnels? Comment vous retourner contre eux en cas de souci?

Je passerai sur les personnes qui se servent de leur Siret concernant une autre activité pour faire la promotion de services photographiques : Nous avons des taxis photographes, des plombiers photographes, des médecins photographes (ça peut être utile en cas de malaise dans un mariage!?).
En général, ce n’est pas leur activité principale alors ils peuvent pratiquer des tarifs déraisonnables … ils n’ont pas les même frais qu’un photographe professionnel, pas forcément les compétences et matériel non plus, regardez les codes NAF, ça donne un bon indice !

Photographie durant une performance d'art contemporain à Bruxelles

Les photographes ont parfois l’impression d’avancer avec un carton sur la tête

Une nouvelle mode: le client fait le tarif !
Désormais, votre client vous dit combien vaut votre prestation pour vous faire gagner le temps d’établissement d’un devis (qu’il est aimable), ce prix est légitimé par l’un des photographes dont je viens de parler qui a pris ce tarif la dernière fois … logique!?
Cela touche aussi bien les particuliers, les agences de comm, les institutions aussi. J’ai hâte d’aller chez le boulanger, de lui dire que la baguette, je la paie 30 centimes (le même prix que j’ai payé la dernière au supermarché pendant l’opération discount : 3 pour le prix de 2), il est sympa ce boulanger!

La mort des droits d’auteur !:

En effet, historiquement, le photographe facturait une prestation ainsi que des droits d’auteur en fonction des usages, publications faites de ses photographies.
Si vous parlez de cela à un client aujourd’hui, il part en courant !
Même si je trouvais ce système fastidieux, il est encore théoriquement en place et devrait être appliqué mais il ne l’est pas. Les autorités ont laissé gagner le « libre de droit » non-sens en rapport avec la législation française. Les diffuseurs veulent pouvoir faire ce qu’ils veulent de vos photographies, gagner le maximum sur votre dos sans jamais repasser à la caisse.
Nous passerons sur l’application du droit moral et des crédits photographiques par ailleurs… combien de fois faudra-t-il répéter que mettre le crédit photo de l’auteur n’est pas une option mais une obligation légale !

Le paiement par cadeau ou le paiement minimal en goodies :
Pour vous citer un exemple, je viens de voir passer un concours (comprenez recrutement) pour faire un reportage sur le festival Hellfest de la marque Doc Martens qui gagne 2 pass (s’il a les qualités requises), deux paires de chaussures et des goodies pour des articles à rédiger chaque jour (s’ils payaient la bière au moins).
Un concours organisé par Auchan de photographies d’animaux dont le gagnant verra sa photographie orner des milliers de boîtes d’aliments contre … des croquettes, l’abandon total de ses droits sur cette image est bien justifié par le cours actuel de la croquette!
Une vrai multiplication de ces « concours » sans gagnants ou les règles comprennent l’abandon, voire la négation de vos droits moraux et patrimoniaux d’auteur.

Une autre menace pour les auteurs: les sites de microstock ou banques d’images au rabais.
Lorsque les droits sur une images sont vendus parfois 15, 40 centimes, que le site prend la majorité en commission. Que l’auteur se retrouve à travailler lui-même à sa perte en prenant du temps pour rentrer ses images sur le site, vous imaginez sa rentabilité?!
Alors cela arrange beaucoup de gens ces images qui ne valent plus rien mais à terme, pas besoin d’être devin pour voir quel est le sort des photographes qui gagnaient leur vie en créant des contenus originaux pour les annonceurs !

ça y est, vous commencez à comprendre? j’en rajoute un peu?

Les photographies de classe et photographies de filmage:
Nous avons tous dans nos cartons ces photos de classes un peu coûteuses sur laquelle nous ne ressemblons à rien. Ces photographies étaient initialement vendues par un photographe, les collèges, lycées prenaient une commission pour s’occuper de l’organisation. Le photographe venait armé de courage, d’une estrade démontable, une belle ardoise et c’était parti!
Cela rapportait plutôt bien au photographe mais aujourd’hui, le photographe perçoit souvent 2€ par image, le reste étant pris par …. alors ne dite pas que le pauvre est un voleur, ce n’est peut être pas sa faute. Sans compter que désormais, la prise de vue est parfois réalisée par un professeur ou autre.

Les photographies de filmage comme votre tête dans une attraction à Disney, votre enfant à la maternité.
Ces photographies autrefois réalisées par de vrais photographes correctement payés sont désormais réalisées par des sociétés qui embauchent n’importe qui au SMIC, intéressant quand vous avez payé entre 250 et 600€ la plaisanterie … les commissions arrivent à motiver pour pousser à la vente … parfois, cela est même interne à la société, pas de petits profits.

Les sites d’aide au choix de votre photographe qui vous assurent que grâce à eux, vous trouverez le meilleur prestataire au meilleur prix. ( les photographes étant rares et cachés dans des grottes, heureusement qu’ils sont là)
Pensons à Starofservices.com, jechercheunphotographe.fr, pour ne citer qu’eux.
Ce que vous devez savoir est que ces sites ne regardent en aucun cas la qualité des prestataires, ni les fondements légaux de leur société non plus !
Il vendent le droit de répondre à votre demande de devis…
Une demande est faite sur leur site pour un photographe, ils vont ensuite demander à tous les photographes inscrits sur le site (et même ceux qui ne voulaient pas forcément s’inscrire) quelques euros pour pouvoir répondre au client. Imaginez l’argent gagné lorsque 5 photographes laissent 2 euros chacun pour essayer de se disputer un marché à 100€ bradé du fait de la forte concurrence!

Opération lors d'une performance d'art contemporain

Toujours une performance mais le métier de photographe, il faut l’opérer?

Les différents annuaires de prestataires ne sont pas tous payant à l’inscription mais des options existent pour que le photographe soit mieux placé dans les recherches moyennant quelques centaines d’euros par an …
Si les clients finaux ne s’en rendent pas compte, les photographes paient cher leur passage par ces structures.
Pensez plutôt à passer par les sites personnels des photographes, achetez une prestation et pas un prix !

Passons ensuite à des sites qui vendent des prestations bradées comme nos amis de groupon.
Nous voyons régulièrement des propositions de shooting à 29€, 39€, merveilleux, quelle affaire !
Etrangement, si vous regardez de près, ce sont souvent des associations (diantre, des associations commerciales …), Groupon, ces casseurs de prix vendent aux photographes le fait de se faire connaitre grâce à cela, prennent bien 45% au passage sur la prestation. Du peu d’argent rentré en caisse, les photographes sont obligés de ruser sur les statuts, de travailler comme à l’usine pour finir par arrêter une fois le matériel fusillé et le goût du métier parti en fumée.

Alors, en admettant que vous soyez artiste photographe, vous vous tournez vers les galeries pour présenter et vendre votre travail.
Les galeries prennent généralement environ 50% sur les ventes, cela peut paraître cher mais les frais sont importants et leur rôle est tellement important que cela se légitime.
Par contre, vous avez du voir apparaître des Yellow korner près de chez vous, la chance de trouver des superbes oeuvres d’art à prix modérés?!
Mais un petit rappel, une oeuvre d’art signifie qu’il en existe moins de 30, toutes tailles confondues, sinon ce ne sont pas des oeuvres d’art mais des tirages numérotés qui prendront probablement peu, voire aucune valeur sauf exceptions.
Ensuite, les pourcentages donnés aux artistes sont insignifiants ce qui ne semble pas très justifiés lorsque cette enseigne est en fait une franchise. Tout le monde peut ouvrir un Yellow korner pourvu qu’il ait les fonds, le choix du galeriste, son travail de sélection, son oeil pour trouver les pépites de demain …ce sera pour une autre fois !
En gros, vous êtes dans un Macdonald de l’art !

Afin de s’en sortir, le photographe se doit d’avoir des clients. Par contre, depuis quelques temps, certains acteurs imposent aux photographes de déclarer avec des statuts non adaptés.
Pour exemple, certaines rédactions de magazines qui imposent aux photographes de déclarer en cessions de droits au lieu de les salarier.
Le statut d’auteur est dévoyé au point qu’il ne faudra pas se plaindre de le voir tomber, la problématiques des intermittents ne sont pas bien loin.

Cet article, bien que long ne montre que la surface des choses. Alors à votre avis, le métier de photographe est-il un métier d’avenir?